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MANUEL D'INSTRUCTION ET D'EDUCATION RELIGIEUSES
Abbé Lucien Arène, Aumônier d'Ecoles libres
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7ème et 10ème Commandements de Dieu

Tu ne voleras pas !
Tu ne désireras pas injustement le bien des autres !

RÉFLEXION

A.- Les premiers Commandements se sont inquiétés des personnes ; mais les derniers se préoccupent de leurs biens. Quels sont les différents moyens de posséder ces biens ? Cela est variable et dépend des lois humaines.

B.- Mais il y a une loi évangélique qui exige de ne pas tellement s’intéresser aux richesses matérielles, parce qu’elles deviennent facilement trop prenantes et risquent de nous faire négliger les biens spirituels. Jésus nous a dit : " Personne ne peut servir deux maîtres à la fois. Vous ne pouvez donc pas servir Dieu et l’argent." (St. Matthieu 6, 22) Et St. Marc nous rapporte cette autre recommandation de Notre-Seigneur " Il est plus facile à un chameau de passer par (la porte de Jérusalem appelée) " le trou de l’aiguille ", qu’à un homme (qui a une mentalité de) riche d’entrer dans le Royaume de Dieu ! " (chap. 10). Et enfin cette autre déclaration du Seigneur, en St. Matt. 6 : " Cherchez d’abord le Royaume de Dieu, et le reste vous sera donné par surcroît..."

C.- Or, si les instincts de reproduction et de conservation sont très forts dans l’individu, celui de possession ne l’est pas beaucoup moins. Posséder, c’est en effet alimenter la vie en vue de la développer par des moyens extérieurs à nous et susceptibles de nous être " incorporés " en ce qui nous semble nécessaire à l’entretien de l’existence et à son développement.

D.- Mais notre imperfection naturelle, et surtout la tache du Péché originel ont souvent désorganisé la bonne harmonie qui existait au moment de la création. Celle-ci consistait dans un usage équilibré et ordonné des bien extérieurs à nous et qui avaient été mis par Dieu à notre disposition.

E.- Toutefois, Jésus n’a pas précisément condamné les richesses ; mais Il en a vivement condamné les mauvais usages, dont la malhonnêteté. Tandis qu’Il a déclaré comme étant " bien-heureux, ceux qui ont l’esprit de pauvreté."

EXPLICATION

1.- Le 7ème Commandement de Dieu nous interdit de prendre ou de garder sciemment et injustement le bien d’autrui. Ce Commandement nous interdit aussi, tout logiquement, de faire un tort quelconque au prochain en ses biens quels qu’ils soient ; comme par exemple la détérioration d’une chose qui nous a été prêtée.

2.- Tous les biens de la terre appartiennent, d’abord et en propre, à Dieu. C’est Lui qui les a créés et qui les entretient constamment dans leur existence. Il est le Souverain Maître de tous et de tout : "La terre est au Seigneur, avec tout ce qu’elle renferme" dit le Psaume 23, 1.

3.- Par ailleurs, le droit de propriété est un droit légitime, car il est d’origine divine, et il est conforme aux lois de la nature. La propriété personnelle s’affirme comme nécessaire. Ce droit est nécessaire à l’individu afin de l’activer, de l’intéresser à assurer son indépendance et aussi pour le stimuler. Si ce droit n’existait pas, personne n’aurait goût ni intérêt au travail.

4.- Ce droit individuel est fondé sur le travail, l’épargne et la possession consécutive à une succession héréditaire ; enfin par les contrats passés en conventions ou accords mutuels entre diverses personnes, pourvu que tout ait été fait devant officiers civils légalement mandatés, ou par la parole donnée.

5.- Ce droit est nécessaire aussi à la famille. Celle-ci a besoin de ce droit pour créer un lien entre ses membres et pour permettre à cette cellule fondamentale de la société de subvenir en paix aux besoins de chacun, dans le présent et dans l’avenir, par le droit d’héritage du bien familial légitimement acquis.

6.- Ce droit est nécessaire enfin à la société, sans quoi ce serait la confusion, l’anarchie, puis l’immoralité. Sans ce droit, il ne peut pas y avoir de paix sociale. C’est le Droit Civil qui confirme, explique et complète la loi naturelle et, dans cette mesure, le Droit Civil oblige lui-même en conscience et donc légitimement lorsque ses lois sont conformes à la morale révélée.

7.- Cependant, si le droit de propriété est reconnu comme un droit entier, permanent, inviolable et transmissible, il n’est pas un droit absolu, égoïste et antisocial. Il a des charges et une fonction sociale à remplir ; il doit contribuer au bien commun.

8.- Voler, c’est prendre injustement le bien du prochain contre sa volonté, ou à son insu ; tandis que ce dernier a plein droit et légitime raison de ne pas être privé de ce bien qui lui a été volé.

9.- Le vol est interdit parce que, par lui, on pèche contre la justice et contre la charité envers le prochain volé à qui l’on fait en même temps injure, en prenant ou en retenant ce qui lui appartient ou lui revient.

10.- Le "bien du prochain" dont il est question est tout ce qui lui appartient légitimement, soit qu’il en ait la pleine propriété, soit qu’il en ait l’usage ou la garde en dépôt.

11.- On nuirait donc au prochain dans ses biens, soit par le vol, soit par rapine. Tandis que le vol se commet en général en cachette, la rapine consiste dans un vol réalisé ouvertement et, éventuellement, en usant de violence.

12.- On ferait encore tort au prochain dans ses biens légitimes par la fraude. Il y a fraude lorsqu’on trompe le prochain dans une opération quelconque de commerce ou d’échange. Par exemple : en se servant de faux poids, de fausse monnaie, de fausses écritures de comptabilité, ou de faux documents ; ou encore en le trompant de quelque manière sur la qualité de la chose fournie, ou sur le prix convenu clairement auparavant.

13.- On dit qu’il y a usure lorsqu’on exige un intérêt illicite ou exagéré pour une somme prêtée ou une marchandise fournie, agissant de la sorte soit en abusant de l’ignorance d’autrui, soit en profitant de la situation nécessiteuse en laquelle ce dernier se trouve.

14.- Il y a bien d’autres injustices encore que l’on commettrait contre le bien d’autrui et qui seraient : lui faire perdre injustement quelque bien légitime ; lui faire tort dans ses possessions ; ne pas travailler comme on le doit ; différer, par intérêt, le remboursement de sommes prêtées ou la restitution d’objets ; aider de quelque façon des voleurs, ne serait-ce qu’en cachant ou achetant des choses que l’on sait être certainement ou très probablement dérobées ; etc.

15.- Il faut bien remarquer par ailleurs qu’il n’y pas qu’envers le prochain, individuellement considéré, qu’il y a possibilité pratique de voler. En effet, qu’il s’agisse d’individus, de familles, ou de sociétés quelconques : un vol reste un vol, quelle qu’en soit sa nature ou sa forme.

16.- En cas de vol quelconque, lorsque cela est encore possible, il y a un devoir impérieux qui s’impose à la conscience du voleur ou de l’indélicat : c’est celui de la restitution de la chose volée à son légitime propriétaire, ou à ses ayant-droit. Lorsqu’il y a eu quelque dommage réalisé, la réparation du dol fait au propriétaire s’impose tout-autant que la restitution d’une chose volée. Un adage latin dit très justement : "chaque chose réclame son maître !"

17.- Lorsqu’il est manifestement impossible de rendre ou de réparer, c’est à une quelconque compensation que l’on sera tenu, en conscience. Et si rien ne peut être réalisé de cela, alors on devra proportionnellement compenser par quelque bien qui devra être fait à des pauvres, soit directement, soit par le biais d’une ou plusieurs "bonnes oeuvres", soit ouvertement, soit en toute discrétion.

18.- On peut cependant, sans pécher, prendre le bien du prochain, ou garder ce qu’il nous a prêté, lorsqu’on est moralement et sincèrement certain de l’accord supposé du propriétaire. Il est permis de s’autoriser à agir de la sorte, lorsque le bien qui est pris ou gardé doit être utilisé dans un cas de particulière et grave nécessité, comme pour subvenir à un besoin jugé extrême et urgent ; par exemple, emprunter un véhicule en l’absence de son propriétaire, afin de transporter à l’hôpital un accidenté nécessitant une intervention médicale.

19.- On pourrait agir pareillement dans le cas où l’on serait moralement certain que, s’il était possible de lui demander de nous donner ou de nous prêter tel bien lui appartenant, le légitime propriétaire de ce bien nous le donnerait ou nous le prêterait, selon la particulière circonstance ou pour nous rendre simplement un service. Evidemment, dans ce dernier cas, cela suppose une affinité amicale ou familiale solide avec le propriétaire, et une connaissance profonde de sa personnalité, pour que l’on puisse préjuger de son consentement.

20.- Le 10 ème Commandement de Dieu nous interdit de désirer injustement le bien d’autrui. On appelle cela : convoiter le bien du prochain. Et convoiter, ce n’est pas simplement désirer ou souhaiter, par exemple, devenir riche ; mais c’est avoir le désir de s’approprier le bien du prochain par des moyens injustes.

21.- Le dixième Commandement de Dieu est donc un complément du septième. L’interdiction est tout-aussi logique que dans le cas d’un vol commis. Celui-ci est réalisé par une action extérieure au voleur ; tandis que dans l’autre cas, le désordre - et donc le péché - est intérieur au voleur intentionnel.

22.- Plus que ses seuls actes, c’est l’intention éclairée, volontaire et libre d’un chacun qui détermine et conditionne la responsabilité. Et l’on comprend aisément que Dieu nous interdise toute pensée ou intention mauvaise. Mais il est bien entendu, comme cela a été dit plus haut en diverses circonstances, que la seule tentation, même forte mais non recherchée ni acceptée, ne peut pas constituer un péché

23.- On peut ajouter ici que le 10ème Commandement nous engage à savoir nous contenter de notre situation. Il nous rappelle indirectement la relativité des biens temporels par rapport aux biens spirituels. Il nous engage aussi à une certaine modestie dans les goûts et les possessions. Il nous protège des idées de grandeur, d’une "mentalité de riche", d’une "volonté de puissance"  et finalement, d’un inévitable égoïsme ou égocentrisme. Il ne prêche pas pour autant - sauf vocation spéciale - le dépouillement de tous biens temporels, ou d’indigence : Il appelle et rappel l’équité et incite à la modestie dans l’usage des biens temporels.

QUESTIONS DU CHAPITRE QUATRE

1.- Récitez les 7ème et 10ème Commandements de Dieu.

- Tu ne voleras pas ; et Tu ne désireras pas injustement le bien du prochain.

2.- Que nous interdisent ces Commandements ?

- Ces Commandements nous interdisent le prendre, de garder, d’endom-mager, ou même de désirer injustement ce qui appartient au prochain.

3.- A qui appartiennent les biens de la terre ?

- Les biens de la terre appartiennent d’abord à Dieu qui les a créés ; puis à ceux qui les possèdent légitimement ; et enfin à ceux qui en ont un besoin vital.

4.- A quoi doivent servir les biens de la terre ?

- Les biens de la terre doivent servir aux besoins de tous les humains.

5.- Quels sont les devoirs de ceux qui possèdent légitimement les biens de la terre ?

- Ces devoirs sont : de faire bon usage des biens de la terre et de contribuer à leur juste répartition pour le bien de tous, appelé " le bien commun. "

6.- Que sont ceux qui prennent ou gardent injustement le bien des autres ?

- Ceux qui prennent ou gardent injustement le bien des autres sont des voleurs.

7.- Quels sont ceux qui gardent injustement le bien des autres ?

- Ceux qui gardent injustement le bien des autres sont ceux qui ne rendent pas ce qu’on leur a prêté ; ou qui ne paient pas, en partie ou totalement, leurs dettes ou le juste prix d’un travail ; ou qui volontairement ne rendent pas ce qu’ils ont trouvé.

8.- Que suppose nécessairement le 7ème Commandement de Dieu ?

- Le 7ème Commandement de Dieu suppose nécessairement de rendre ce qui ne nous appartient pas ; de réparer le tort fait au prochain par notre faute ; de payer nos dettes et le juste prix des choses dû aux autres.

9.- Que nous interdit le 10ème Commandements de Dieu ?

- Le 10ème Commandement de Dieu nous interdit le désir et l’intention de voler.

CONSÉQUENCES PRATIQUES

A.- Qu’il s’agisse du respect du bien d’autrui ou de celui de l’honnêteté en général, ou de la réputation du prochain : il faut nous interroger souvent sur ces points importants. Il le faut, d’abord pour réagir contre ce qui nous entoure d’indifférence et de malhonnêteté ; et il le faut, d’autre part, pour rectifier éventuellement notre état d’esprit et notre comportement envers le devoir de l’équité, de la justice et du respect dû à autrui dans ses biens moraux, comme dans ses biens matériels.

B.- Nous devons être honnêtes et délicats jusqu’au scrupule, en nous refusant tout larcin ou vol. Nous rendrons scrupuleusement à son juste propriétaire ce qui lui appartient, qu’il nous ait prêté ou qu’on lui ait pris injustement son bien. En particulier, nous prendrons l’habitude de respecter ce qui nous a été prêté, et de le rendre en parfait état !

C.- Enfin, les réponses aux 8ème et 9ème questions ci-dessus constituent tout un programme de justice et de vertu d’honnêteté à respecter scrupuleusement.